Les promesses de campagne ont-elles été tenues ? Un an déjà que le Pastef est au pouvoir au Sénégal
Le 2 avril 2024, Bassirou Diomaye Faye devenait président de la République du Sénégal, scellant ainsi la victoire électorale historique du parti PASTEF après moult rebondissements. Porté par la majeure partie des sénégalais et un programme articulé autour de la rupture, ce nouveau pouvoir incarnait un espoir de renouveau pour une population éprouvée par plus de trois années de tensions politiques et de dérives institutionnelles de la part du régime Sall. Douze mois plus tard : les promesses de campagne ont-elles réellement été tenues ?
Des réformes économiques ambitieuses, freinées par un lourd héritage
L’un des axes majeurs du programme du PASTEF concernait la refondation économique du Sénégal. Depuis le début de son mandat, le président Diomaye Faye doit composer avec une réalité budgétaire beaucoup plus contraignante qu’annoncée. En effet, le gouvernement a hérité d’une dette publique dont le montant avoisine la totalité du produit intérieur brut du pays. À cette charge officielle s’est ajoutée une dette dite "cachée", révélée récemment par le Fonds monétaire international, et estimée à plus de 7 milliards de dollars. Contractée entre 2019 et 2023, cette dette rend difficile les marges de manœuvre du gouvernement.
Malgré cela, des avancées de fond sont à souligner. Sous la présidence de Diomaye Faye, le Sénégal a officiellement rejoint le cercle restreint des pays producteurs de pétrole, amorçant une nouvelle ère sur le plan énergétique. Toutefois, loin de se satisfaire de cet acquis, le chef de l’État a initié une relecture des contrats pétroliers signés sous le précédent régime, les jugeant inéquitables pour l’État sénégalais. D’autres mesures symboliques marquent également cette volonté de rupture. Le gouvernement a ainsi mis fin aux accords de pêche avec l’Union européenne, largement considérés comme défavorables au pays et responsables d’une surexploitation des ressources halieutiques au détriment des pêcheurs locaux. Par ailleurs, l’exécutif a présenté les grandes lignes du Plan Sénégal 2050, une stratégie de développement à long terme visant à diversifier l’économie et à réduire la dépendance aux exportations de matières premières. Ces différentes avancées, bien que peu perceptibles dans le quotidien du citoyen lambda, dessinent une dynamique de long terme qui pourrait transformer en profondeur l’économie de chaque ménage.
Une diplomatie de rupture et de repositionnement stratégique
Sur le plan géopolitique, le président Bassirou a rapidement affirmé une posture claire de rupture avec certaines pratiques héritées du passé. Il a notamment adressé une réponse ferme au président français Emmanuel Macron, qui reprochait aux dirigeants africains de ne pas exprimer suffisamment leur »reconnaissance » à la France. Dans la foulée, le Sénégal a demandé le retrait progressif des troupes françaises encore présentes sur son territoire, renforçant l’image d’un pouvoir résolu à mettre fin au néocolonialisme.
Par ailleurs, le positionnement du Sénégal sur la scène régionale a été renforcé. La nomination de Bassirou Diomaye Faye comme médiateur entre la CEDEAO et l’Alliance des États du Sahel (AES) illustre la volonté du nouveau président de jouer un rôle de rassembleur dans un contexte de conflit croissant entre les pays d’Afrique de l’Ouest. Sa tournée diplomatique dans plusieurs capitales du Sahel peu après son élection a également montré son ambition d’œuvrer à une coopération renouvelée entre États africains, au-delà des différences idéologiques ou institutionnelles.
L’épine dorsale du gouvernement en place : l’abrogation de la loi d’amnistie
Sur le plan intérieur, l’une des décisions les plus débattues de ces derniers jours a été l’abrogation partielle de la loi d’amnistie adoptée en mars 2024. Initialement pensée pour pacifier l’espace politique en permettant la libération de plusieurs figures de l’opposition, cette loi couvrait également des faits graves survenus lors des violentes crises politiques de 2021 à 2023. Face à la pression des familles de victimes et des organisations de la société civile, le gouvernement a revu sa position : les crimes tels que la torture, les assassinats et les disparitions forcées ne bénéficieront plus d’aucune amnistie. Cette décision marque un tournant dans la quête de justice et la reconnaissance des souffrances endurées par de nombreux Sénégalais au cours des dernières années. Elle soulève également chez des anti-Diomaye, la question de l’impartialité du Pastef qui est désormais au pouvoir et doit se départir de ses relents militants. Pour eux, cette abrogation partielle n’est que l’ouverture de la chasse aux sorcières.
Conclusion : un premier chapitre qui pose les fondations d’un futur incertain
Un an après l’arrivée au pouvoir du tandem Sonko-Diomaye, le bilan du PASTEF reste contrasté. Le gouvernement Diomaye Faye a engagé des chantiers d’envergure, aussi bien économiques que institutionnels, avec pour objectif de restaurer l’État et de redonner confiance à la population. Néanmoins, les résultats tangibles tardent encore à se faire sentir pour une partie de la population, confrontée à des difficultés économiques persistantes et à un quotidien inchangé. Cette première année de mandature semble davantage destinée à réparer, réformer, et remettre à niveau les fondations d’un État fragilisé. En espérant que les quatre prochaines années aient un impact plus concret sur l’économie du pays.