Regime Biya en pleine décadence : Une analyse de l’écosystème politique camerounais et des dernières sorties médiatiques

Après plus de quarante-deux ans au pouvoir et sept mandats successifs, le régime de Paul Biya semble être en plein déclin, submergé par une accumulation de défis économiques, sociopolitiques et institutionnels. À l’aube de l’année 2025, qui marque un tournant décisif avec les élections présidentielles à venir, les critiques envers le pouvoir en place se font de plus en plus virulentes. Parmi elles, les récentes déclarations de figures influentes, telles que l’archevêque de Douala, Mgr Samuel Kleda, qui qualifie une nouvelle candidature de Paul Biya de « risquée » pour le pays, illustrent bien cette défiance.

Les tensions au sein du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), le parti du président en exercice, ne passent pas inaperçues. Bien que certains de ses membres continuent de défendre l’idée d’un mandat supplémentaire pour le patriarche âgé de 91 ans, des dissensions internes viennent accentuer la fragilité de la structure partisane. Cette situation fait d’autant plus apparaître la nécessité d’une analyse fine de l’écosystème politique camerounais à l’approche de ce scrutin crucial.

Paul Biya : Leader charismatique pour certains, tyran pour d’autres

Les récentes sorties médiatiques des cadres du RDPC peignent un portrait d’un président encore en pleine maîtrise de la situation, malgré son état de santé fragile et ses nombreux séjours à l’étranger, notamment celui à Paris qui a alimenté des rumeurs sur sa mort. Lors de cet épisode, la dégradation physique du président était apparente, alimentant les inquiétudes sur sa capacité à assumer les responsabilités d’un second mandat. Ce contraste entre l’image projetée et la réalité de la situation est au cœur des débats actuels.

L’opposition, de son côté, met en avant un autre constat : celui de la déconnexion entre la gouvernance actuelle et les réalités du terrain. La centralisation excessive du pouvoir et le népotisme sont des accusations récurrentes qui fragilisent les institutions démocratiques. Un trio de septuagénaires domine la scène politique : le président de la République (91 ans), le président de l’Assemblée Nationale, Cavayé Yeguié Djibril (85 ans), et le président du Conseil Constitutionnel, Clément Atangana (83 ans).

Dans ce contexte, des figures de l’opposition comme Cabral Libii et Maurice Kamto adoptent un discours résolument tourné vers l’avenir, prônant un changement radical de leadership. Dans leurs vœux pour l’année 2025, ils ont esquissé une vision alternative pour le pays, fondée sur la décentralisation, la transparence et la justice sociale. Ces propos, relayés par des médias internationaux tels que RFI et BBC Afrique, annoncent clairement l’ouverture d’une campagne électorale déjà bien amorcée.

Sur les réseaux sociaux, en particulier sur TikTok, une dynamique intéressante se déploie. Les jeunes camerounais se mobilisent activement, appelant à l’inscription sur les listes électorales et à la récupération des cartes d’électeurs. Le slogan « Battre Paul Biya par les urnes » devient un mot d’ordre parmi les influenceurs et créateurs de contenu, tels que le collectif « La Periztocratie », qui incitent malgré tout à accomplir leur devoir civique, malgré les craintes liées aux fraudes électorales.

L’écosystème politique camerounais : Une démocratie en crise

Bien que le Cameroun soit souvent perçu comme un modèle de stabilité relative en Afrique centrale, sa démocratie est de plus en plus fragilisée par des pratiques électorales opaques et des restrictions des libertés fondamentales. La Commission Électorale Nationale (Elecam) est régulièrement accusée de partialité, et la question de la transparence des élections se pose avec acuité. Depuis le 30 décembre 2024, une polémique grandissante entoure le fichier électoral, en particulier le nombre d’inscrits qui, selon certains observateurs, serait largement gonflé. Jean Michel Nintcheu, député et soutien déclaré de Maurice Kamto, dénonce la manipulation des chiffres et la complexification des procédures d’inscription pour les Camerounais de la diaspora.

Par ailleurs, les conflits persistants dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest continuent de fragiliser le pays. Les promesses de dialogue national, souvent évoquées mais rarement concrétisées, ont laissé place à une méfiance généralisée envers le pouvoir central, exacerbant le sentiment de division et d’injustice.

La question de la succession : Le spectre d’une dynastie politique ?

Si Paul Biya n’a pas encore fait d’annonce officielle concernant sa candidature pour 2025, la question de sa succession occupe déjà une place centrale dans les discussions informelles. Nombreux sont ceux qui spéculent sur l’éventuelle montée en puissance de son fils, Frank Biya, comme futur héritier. Cette possibilité ravive les débats sur la création d’une dynastie politique à la manière du Gabon, du Togo ou de la Guinée Équatoriale. Cette perspective nourrit la crainte d’une prolongation artificielle du pouvoir au-delà des mandats du président actuel.

Conclusion : Une nation à la croisée des chemins

Le régime Biya, jadis perçu comme un modèle de stabilité, se trouve aujourd’hui confronté à une remise en question fondamentale de sa légitimité et de sa légalité. Les récentes sorties de figures religieuses, politiques et civiles témoignent d’une fracture profonde dans le tissu social et politique du pays, fracture qui pourrait bien être le prélude à un tournant majeur pour le Cameroun.

À l’approche des élections de 2025, le pays semble se retrouver à un carrefour historique, avec un RDPC déterminé à se maintenir au pouvoir et une opposition prête à tout pour en finir avec ce régime vieillissant. La violence ne résoudra aucun des maux qui frappent le Cameroun. Le pays dispose d’une opportunité unique de redéfinir son avenir, en optant pour une transition pacifique, fondée sur les principes démocratiques, l’organisation d’élections libres et transparentes, et l’alternance politique.



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